samedi 18 septembre 2010

Appât rance

Mardi vers 19h00, je n'avais rien d'autre à faire que de feuilleter les pages internet à la recherche d'un homme tel que je les aime : costaud, poilu, bref la virilé même.
Sur un site de rencontre, je tombai sur un profil vraiment alléchant. 1m76,78 kilos et d'après la photo affichée (qui me dévoilait le mâle en caleçon, étendu dans une position équivoque) c'était tout-à-fait le genre que je cherchais. Et en plus, il avait eu la délicatesse de laisser son numéro de téléphone. C'était parfait. Je lui envoyai donc sur le champ un petit sms neutre mais
suffisamment explicite que pour obtenir une réponse motivée.
Le lendemain, je reçus un appel avec numéro masqué, je décrochai. Le type me dit qu'il avait reçu mon sms et qu'il était emballé pour qu'on se voit dans la soirée! Et même si je l'avais trouvé un peu con de m'appeler avec un numéro masqué lorsque son numéro est visible sur son profil par des milliers d'internautes, et même si sa voix était aussi virile que celle d'une fillette de 9ans, j'acceptai.
Le soir tomba enfin, mes yeux brillants de concupiscence scrutaient la foule à la recherche d'une brute au t-shirt vert(il m'avait dit qu'il porterait un t-shirt vert). A chaque mec qui faisait mine de s'approcher, je frissonais de terreur ou de plaisir, selon le cas (oui, je sais que vous avez tous connu ce moment où vous vous demandez s'il ne vaudrait pas mieux partir en courant). J'aurais dû partir! Mais il était trop tard, à travers ma tête passaient tous les trucs que j'usais d'ordinaire pour me débarrasser d'un intrus.
Non, je ne pouvais pas le nier, vu que je m'étais pour une fois décrit dans le moindre détail.
Non, je ne pouvais pas non plus esquiver car il m'avait vu avant que je ne le voie.
Non, je ne pouvais pas non plus jouer subitement à l'hétéro-macho car, au lieu de le repousser ça n'aurait fait que l'attirer davantage.
Oui, ce mec était... plus dame que vrai...assorti de son facies creux et livide tel une souillure entamée par la vie. Son t-shirt moulait ses 40 kilos comme un vugaire bas moulant un mollet. Bien sur il affichait cette apparence qu'il croyait très tendance dès lors où il enfilait un jean usé par les lavages à la main et à la pierre. Inutile de vous dire que j'étais face à l'image emblématique du gigolo prévisible. C'était à s'y méprendre: sa maitrise de l'anglais était si parfaite qu'on se serait cru à Oxford. Le challenge n'était pas facile: paraitre très up-to-date tout en camouflant la dure réalité de sa vie de parasite.
Bref, c'était bien essayé, mais ça ne trompait pas:son look vieille fillette était sûrement inspiré de la Nouvelle Star 2005: Christophe. Il était visiblement très heureux.
Moi non.
Je proposai donc... d'aller boire un café, loin, bien loin du centreville... mais ct raté, j'étais déjà bien repéré dans la foule, avec cette dame qui se trémoussait et qui riait bien haut en échaffaudant déjà des plans pour se revoir.
Arrivé au café, j'étais prêt à tout pour écourter ce moment. Je demandai un jus d'orange que je bus vite fait. Mais lui bien sûr avait pris un café. Eh merde, il fallait attendre qu'il le termine... J'avais envie de souffler sur la tasse, ou pire de le renverser d'un geste faussement malabile mais...
tout-à-coup, son portable se mit à sonner, pendant que je regardais mes pieds, il parlait en accompagnant chaque parole de grands gestes. Mais il s'était arrêté de causer. Il me demanda si un de ses amis pouvait nous rejoindre. Persuadé que comme ça nous serions au moins deux mecs, j'acceptai sans hésiter. Comme j'avais été injuste lorsque je l'avais cru effeminé. Son ami l'étais encore bien plus. Habillé tout en blanc, coiffé comme Mireille Mathieu il s'assit gracieusement à côté de nous. Il réussit même à faire un scandale au garçon parce qu'il avait mis trop de café dans son lait chaud. Là ct exagéré. J' envoyai un sms à un ami pour qu'il m'appelle... et quand il le fit, je raccrochai en disant à mes compagnons de déroute que je devais absolument y aller, que mon frère m'attendait en ville.
Là, sans doute intéressé par la perspective de se tapper mon "frère", ils proposèrent de m'accompagner. Je me demandais vraiment par quel moyen j'allais m'en débarrasser, j'avais même payé la tournée pour qu'il n'y en ait qu'une...
Il me suivirent dans la rue, je tentais de mettre un maximum de gens entre eux et moi mais bon ct pas difficile de les perdre. Enfin, je leur fis un signe comme quoi mon frère était là, plus loin (bien sûr il n'en était rien) et à leur yeux ébahis, je me mis à courir vers un inconnu à qui je demandai je ne sais plus quel renseignement pour qu'on ait l'air de se connaitre comme deux frères...
Je rentrai enfin chez moi, en me disant que la vie est un conte de fée, mais qu'il ne faut pas trop s'emballer sur le prince charmant, avant d'être certain que ce n'est pas une princesse en manque.

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